Sacs, pochettes, bijoux, chaussures… Dans sa cabane-atelier, l’arcachonnaise Marielle Philip transforme les peaux de poissons en cuir véritable. Une passion née d’un voyage en Laponie et d’un profond engagement environnemental.
Marielle Philip a l’océan qui coule dans ses veines depuis sa tendre enfance. Il faut dire que cette native du Bassin a de qui tenir, avec un père et un grand-père pêcheurs, et une mère engagée dans le « Réseau européen des femmes de la pêche ». Tout un programme ! Marielle Philip, elle, se destinait plutôt à des études de Droit environnemental. En 2011, son Master 2 en poche, elle rêvait de devenir avocate spécialisée dans les questions environnementales. Si la cause est belle, les places sont chères, et Marielle Philip se voit contrainte de changer son « harpon » d’épaule. « Ma mère avait eu l’occasion de se former au tannage de peaux de poisson lors d’un voyage en Laponie, confie-elle. Elle en était revenue enchantée, et cette idée de peausserie de peaux marines m’a finalement séduite. Elle alliait ma passion du milieu marin et mon engagement écologique, car beaucoup de peaux de poissons sont jetées à la poubelle au lieu d’être valorisées. »
La Laponie comme inspiration
Fonceuse et investie, Marielle Philip décide alors de fonder sa propre tannerie en favorisant l’économie circulaire. Mulet, bar, sole, saumon, truite… Marielle Philip tanne toutes sortes de peaux, collectées auprès de poissonniers et mareyeurs du coin. Dans son atelier-cabane, sur le port ostréicole de La Teste, elle va minutieusement travailler les peaux jusqu’à les transformer en cuir aussi souple que solide. Pour trouver la bonne formulation, la jeune créatrice s’est longuement documentée, a testé différentes techniques pour finalement aboutir à sa propre recette, inspirée des Lapons. « Dans un premier temps, j’enlève les écailles, j’extrais les résidus de chair, puis je plonge les peaux dans un bain tannique, élaboré à partir de broyat d’écorces de mimosa, explique-t-elle. Le bain, il ne faut pas se louper pour éviter toute oxydation, car il n’y a aucun produit chimique ajouté ! »
En général, les peaux vont macérer pendant une dizaine de jours, puis la tanneuse du Bassin va les teinter avec des colorants sans sels métalliques. Vient ensuite l’heure du séchage, lent, à température régulière, pour garantir la souplesse et la beauté des peaux.
Maroquinerie, bijoux, chaussures…
De la vague au cuir, il faut compter 3 semaines environ, avant d’obtenir une peau prête à être vendue auprès des chausseurs, maroquiniers, artisans d’art. « Je tanne en moyenne 50 kg de peau par mois, détaille Marielle Philip, qui a lancé une petite collection de maroquinerie, ainsi qu’une ligne de bijoux. Comme toutes les peaux ne sont pas parfaites, j’utilise les plus petites pour ma collection de joncs de mer et de bracelets de montres. » Femer s’est également associée à l’atelier landais Pas Kap, qui fabrique des chaussures sous la marque « La Pylataise ». Plusieurs fois récompensée pour son engagement durable et solidaire, l’entreprise FEMER a également remporté le concours régional des « Talents du BGE Aquitaine. L’occasion de rencontrer Philippe Loiseau lors de la remise des prix… » J’ai finalement rejoint la CPME cette année ! confie Marielle Philip dans un sourire. Seul on va plus vite, mais ensemble on va franchement plus loin. J’avais besoin de retrouver mes pairs après une année « Covid » difficile, marquée par l’isolement et l’activité en berne. La force du réseau va me redonner l’énergie d’entreprendre et l’envie de créer à nouveau ! »
Loin de baisser les bras, Marielle Philip a des projets plein les filets ! En parallèle à son travail aux côtés de son compagnon ostréiculteur, elle souhaite développer une ligne de baskets, made in Bassin. Bientôt, les poissons ne nageront plus… ils vont courir !
* Prix de la Start-Up entreprise & environnement dans la catégorie économie circulaire (concours national organisé par le ministère de l’Environnement et l’Ademe), prix Apec 2014, Grand prix du challenge des entrepreneurs Deba, Oyster Trophy…
